L'« Enfer » est pavé de mystères : des livres connus mais introuvables, des œuvres qui ont marqué une époque mais qui ont disparu, des chefs-d'œuvre qui ne sont jamais allés plus loin que le faire-part d'un catalogue clandestin...
Ce petit roman, Petites alliées, écrit par Miss Clary F..., publié par l'éditeur Sammy de New York, dont le contenu fait au moins croire à une date : 1919, fait partie de ces mystères.
Extrait du catalogue clandestin offrant Petites Alliées, roman vécu en 1919 :
« Quelques jeunes filles de nationalités différentes ont voulu se mêler à la Grande Guerre, cherchant dans ses dangers et ses horreurs des sensations nouvelles, en quelque sorte sadiques. Avec une admirable belle humeur qui ne se dément pas un instant, elles satisfont toutes leurs dépravations, toutes leurs perversions au milieu de scènes sanguinaires. L'une d'elles raconte ses troublantes aventures et sait, en des tableaux d'une luxuriante et luxurieuse poésie, évoquer les voluptés les plus inconcevables. »

Beaucoup de choses étaient dites en peu de lignes, mais peut-être avec une certaine timidité. Pourtant cela n'échappa pas à un savant spécialiste, auteur d'un Dictionnaire de la littérature érotique (Les œuvres et les auteurs, Éditions Tattilo), de Boccard, qui approfondit avec une rare sagacité : « Se référant à la première guerre mondiale, l'auteur eut la bonne idée de conter les aventures très galantes d'un certain nombre d'infirmières volontaires, aristocrates raffinées, de pays différents (France, Russie, Italie, Angleterre, Japon, Roumanie) en guerre avec les Empires Centraux. Ce thème de l' « alliance » et de la contribution – érotique aussi – offertes à la cause de la « liberté» par ces fascinantes et très féminines croix-rouges apparaît tellement exploité dans le roman qu'il rend légitime le soupçon qu'il ait été spécialement commandé dans des buts de propagande patriotique par quelque service compétent de « la guerre psychologique » du Commandement Suprême Interallié de Paris. Si l'hypothèse se révélait juste, elle mériterait d'être étudiée avec attention. Petites alliées pourrait même devenir un des très rares exemples de produit pornographique d'État ».